2016 – 2019
En Afrique, une personne à la peau foncée est dite « noire », tandis qu’une personne à la peau claire est dite « blanche ». Ces mots, hérités de la colonisation et autrefois utilisés pour classer les races restent aujourd’hui sensibles, notamment en France, où « noir » peut être perçu comme raciste, rappelant une histoire douloureuse. En Afrique, ces termes s’emploient plus naturellement, mais leur pouvoir de distinction et de séparation demeure.
Ces catégories effacent souvent l’individualité, laissant place aux stéréotypes et aux préjugés. Le physique supplante ce que nous sommes réellement, comme si classifier était plus rassurant que reconnaître la singularité.
Noir et blanc : l’association de ces deux « non-couleurs » crée un contraste, alors que les nuances existent pourtant toujours. Mais dès que ces mots résonnent, ils nous distinguent et nous opposent de manière indiscutable. Le travail photographique réalisé explore et met en lumière ces réflexions, interrogeant l’identité et les rapports humains.
Noir sur noir /Blanc sur blanc
Cette première série présente des visages de femmes noires peints en noir sur fond noir, ainsi que des visages de femmes blanches peints en blanc sur fond blanc. La question de l’identité se pose immédiatement : le choix de la prise de vue frontale rappelle la photographie d’identité, tandis que la peinture, étalée en couche épaisse sur la peau, gomme les traits du visage. Le visage se noie dans la non-couleur, jusqu’à sa négation, jusqu’au néant. Les femmes noires comme les femmes blanches perdent ainsi leur identité dans ces non-couleurs censées les définir.
Révélations
Cette peau appelée noire ou blanche : l’est-elle véritablement ? Lorsque la gouache craquelle, la carnation de la peau se révèle bien plus complexe. Le masque se fissure, le corps se libère, se meut, jusqu’à laisser apparaître le visage et l’identité de la personne. Chaque femme se révèle unique, par sa couleur de peau, par ce qu’elle incarne. Elle se réapproprie également pleinement son corps. La révélation ne se fait pas sans douleurs, sans heurts : c’est un arrachement, une sortie hors d’une peau, d’une absence de couleur, d’un masque qui n’a jamais été le leur. C’est un passage nécessaire pour parvenir à se dévoiler, à être, à exister autrement. C’est une renaissance.
Ce projet célèbre ainsi la diversité ethnique : montrer les différences pour révéler la féminité, la fragilité et l’humanité de chaque femme, au-delà des apparences et des catégories préétablies. En se dévoilant sous nos yeux, ces femmes viennent nous raconter qui elles sont.
© Copyright 2020 – Crédits photos: Virginie Rassat – Conception et réalisation: Virginie Rassat